EAF 2021 : une épreuve qui ne passe pas !

mercredi 2 juin 2021
par  Sylvie Lesné

En préambule, rappelons que le SNES-FSU demande toujours l’abrogation de l’épreuve du Grand Oral, épreuve que ni les élèves, ni les personnels n’ont eu le temps de s’approprier, et qu il dénonce également le mauvais choix du ministre concernant l’épreuve de philosophie, dévalorisant et l’épreuve et la discipline.
La communication du SNES national est ici

Alors que les équipes de Lettres doivent encore digérer les bouleversements de programmes et de méthode induits par la réforme du lycée et alors que la session inaugurale du nouveau bac de français n’a pu être expérimentée en 2020, le Ministre de l’Éducation nationale, contre toute attente, a choisi de maintenir l’EAF l’année même où l’enseignement en hybride a prévalu de bout en bout, creusant des écarts non négligeables entre établissements et retardant pour tou.te.s les collègues l’avancée dans le programme.

Comme si cela ne suffisait pas, les équipes ont reçu des directives émanant de l’inspection régionale sous la forme de trois documents le 19 mai dernier, la veille de la fameuse visio explicative du corps d’inspection avec les coordonnateurs et coordinatrices de la discipline, provoquant chez un certain nombre de collègues un surcroît de stress, particulièrement malvenu à la fin d’une année, ô combien difficile.

De nouvelles prescriptions alourdissant encore la surcharge de travail :

Dans ces documents, sous couvert d’organisation, un certain nombre d’injonctions sont formulées plus ou moins implicitement :

  • Imposition de la numérisation
    Par exemple dans le calendrier fourni, il est stipulé : « le 18, date limite numérisation des copies ». Or, question brûlante, non abordée : Qui va numériser les fameuses copies ? [La même question s’était posée pour les E3C de janvier 2020]
    De même, à partir du 22 juin, il y aura « correction à domicile via la plateforme Santorin ». Qui parmi les collègues de Lettres a donné son accord pour corriger numériquement ? Le support de correction doit-il leur être imposé ainsi ? Cela ne relève-t-il pas plutôt du libre choix des professionnel-le-s de terrain ? Il ne s’agit pas là d’un point de détail. La correction en numérique bouleverse considérablement nos pratiques professionnelles et peut également offrir à l’administration de nouvelles possibilités de surveillance, de contrôle ou de modification du nombre de copies … Sans compter que sur le plan sanitaire, ce mode de travail ne convient pas à tous et à toutes, loin s’en faut !
  • Copie numérique des œuvres étudiées
    Autre « étonnante » nouveauté : « Tous les textes susceptibles de faire l’objet d’une interrogation dans la première partie de l’épreuve orale doivent figurer en annexe du récapitulatif ».
    En clair, il est sous-entendu qu’on attendrait de l’enseignant.e qu’ils-elles fournissent, en même temps que la liste des extraits, la copie numérisée de tous les textes étudiés, au lieu de renvoyer à des pages d’œuvres ou de manuel et sachant qu’en parallèle, l’élève doit venir, lui aussi, avec la photocopie de tous ses textes pour l’épreuve. Encore une surcharge de travail inutile en perspective pour renseigner cette annexe, sans compter les collègues qui se sentent obligé.e.s de retaper manuellement tous leurs textes pour les débarrasser de leurs notes !
  • Nombre de séries de sujets pour l’écrit insuffisant
    Concernant les énoncés de sujets pour l’écrit, les explications sur le choix des sujets à l’écrit sont ambiguës : « deux séries de trois sujets de dissertation, chaque sujet de dissertation étant en rapport avec l’une des œuvres inscrites au programme limitatif et son parcours associé. »
    Faut-il comprendre que les trois sujets de dissertation portent sur le même objet d’étude ou qu’il y a un sujet de dissertation pour chacun des objets d’étude ?
    Pour couronner le tout, dans la plupart des établissements, deux objets d’étude ont été faits en hybride, un troisième à moitié ou globalement en distanciel et un quatrième... pas du tout !
    Donc, en limitant le nombre de séries de sujet à deux, les élèves peuvent tomber sur l’objet d’étude non fait et sur celui fait majoritairement en distanciel, ce qui les mettra , à coup sûr, en difficulté. Rappelons que l’année dernière , le même ministre avait décrété qu’aucun des textes effectués en distanciel ne devait figurer sur la liste du bac ! …
  • Des collègues de Lettres corvéables à merci.
    Cerise sur la gâteau, la FAQ, prévoit quant à elle, des collègues de Lettres présent.e.s sur tous les fronts :
    « Un professeur de Lettres peut être convoqué pour assurer des surveillances d’examen dans le temps où il n’est pas affecté à une mission d’évaluation d’examen » (p.2).
    Que faut-il comprendre ? Tout collègue, avant de recevoir des copies ou de faire passer l’oral, serait-il/elle, susceptible de surveiller des épreuves avant le 22 juin ?
    Dans bon nombre d’établissements de l’académie, les collègues de Lettres risquent ainsi de cumuler allègrement EAF et Grand Oral (même si les IA-IPR ont affirmé que non), EAF et BTS, EAF et surveillances diverses et variées... Certaines Directions s’en donnent même à coeur-joie et programment des révisions, plus ou moins à l’insu des collègues, pour faire réviser à l’écrit ou à l’oral des élèves... qui ont pourtant bénéficié de la fameuse continuité pédagogique maintes fois encensée par le Ministre Blanquer !

Le SNES-FSU académique demande de toute urgence une audience auprès de la DEC, de la doyenne de l’inspection et de la Secrétaire Générale du rectorat. Nous considérons que le risque psycho-social entraîné par ces prescriptions de dernières minutes est considérable et nous l’évoquerons au prochain CHSCTA.

Les revendications que nous portons à propos de cette EAF version 2021

 1 / Les enseignant.e.s de Lettres participant à l’évaluation de l’EAF ne peuvent être des moyens de surveillance.
 2 / Les examinatrices-teurs doivent pouvoir choisir le support ( papier ou numérique) pour les corrections à effectuer à l’écrit.
 3 / La numérisation des copies doit être cadrée administrativement et sans recourir au personnel d’enseignement.
 4 / Les annexes doivent être laissées à la libre appréciation de chaque collègue, comme habituellement, surtout pour le cas où le manuel scolaire a été utilisé (rendant inutile les photocopies) et dans la mesure où les œuvres font l’objet d’un programme national.
 5 / L’inspection doit veiller à ce que l’écrit offre un commentaire et une dissertation sur trois objets d’étude sur quatre et non pas simplement deux. Il est indispensable d’offrir aux élèves des possibilités de choix sur au moins trois objets d’étude et pas seulement deux. C’est la seule manière de leur garantir de tomber sur l’un des deux objets traités intégralement avec des temps de présentiel.

N’hésitez pas à réagir à cet article (par mail à s3orl@snes.edu) et à nous faire remonter rapidement toutes vos propres remarques et analyses afin que nous soyons les plus efficaces et pertinent.e.s que possible lors de cette prochaine audience !

Enfin, nous vous rappelons qu’au niveau des établissements, les examens blancs et autres entraînements à l’oral ne font pas partie des missions statutaires et qu’il n’y a aucune obligation pour les collègues. Ce ne sont que des propositions. Organiser un calendrier, ce n’est pas pour autant avoir le pouvoir ou le droit de l’imposer. Les collègues doivent considérer qu’ils/elles ont à leur disposition un planning dont ils/elles peuvent s’emparer — ou pas !

C’est maintenant qu’il faut réagir pour faire respecter des principes susceptibles de ne pas dégrader davantage nos conditions de travail lors du passage des futures EAF !